Swisseco n° 29 – 3 questions à Mme Annalise Eggimann, CEO d’Innosuisse
Mme Annalise Eggimann, CEO d’Innosuisse
« Pour un pays comme la Suisse, la compétitivité passe souvent par l’innovation »
Dans ce nouveau numéro, nous avons voulu comprendre l’essence de l’innovation suisse qui ne cesse de se distinguer à l’échelle internationale. Pour ce faire, nous nous sommes entretenus avec Mme Annalise Eggimann, CEO d’Innosuisse – l’Agence suisse pour l’encouragement de l’innovation. Elle revient sur les facteurs qui permettent à la Suisse de maintenir son positionnement de choix, mais aussi sur la coopération maroco-suisse en matière d’innovation. Interview
Une analyse élargie du tableau de bord européen de l’innovation 2023 (The European Innovation Scoreboard) vient de sacrer la Suisse comme pays le plus innovant de l’Europe. Comment expliquez-vous ce positionnement de choix et quels sont, selon vous, les leviers qui permettent à la Suisse d’être un acteur majeur dans ce domaine ?
L’innovation est, en effet, une recette de succès pour la Suisse. Il n’existe pas de formule magique. Les facteurs qui expliquent la position de pointe de la Suisse en matière d’innovation sont nombreux : les hautes écoles helvétiques à la renommée mondiale, la stabilité politique, le système de formation duale et une riche histoire de PME et d’entreprises aussi innovantes que performantes. Les dépenses du secteur privé dans la recherche et le développement sont importantes en comparaison avec l’international grâce notamment à l’industrie pharmaceutique et chimique. Pour un pays comme la Suisse, avec un petit marché domestique et des coûts salariaux élevés, la compétitivité passe souvent par l’innovation. Celle-ci aide les entreprises et notamment les petites et moyennes entreprises à rester compétitives, en particulier celles actives sur les marchés internationaux.
Il est donc évident que l’innovation est et doit rester au cœur du développement économique de la Suisse. Cependant, investir dans l’innovation coûte et comporte certains risques pour les entreprises. Le rôle d’Innosuisse, en tant qu’agence gouvernementale, est justement d’encourager les entreprises suisses à innover en collaborant avec des instituts de recherche en Suisse comme à l’étranger.
Comment créer davantage de ponts de l’innovation entre la Suisse et le Maroc ?
La stratégie internationale de la Suisse dans le domaine de la formation, de la recherche et de l’innovation repose notamment sur le principe selon lequel il appartient aux acteurs autonomes et responsables (individus, hautes écoles, institutions de recherche et d’innovation) de nouer et d’entretenir eux-mêmes leurs partenariats internationaux. Ce principe dit « Bottom-up », selon lequel les acteurs décident eux-mêmes avec qui ils souhaitent collaborer et sur quelle thématique a fait ses preuves. Le Secrétariat d’État suisse à la Formation, à la Recherche et à l’Innovation mandate ainsi certaines hautes écoles en Suisse en tant que « Leading House » pour le développement de financements initiaux et de projets pilotes innovants. Ainsi, la coopération en matière de recherche et d’innovation peut être approfondie avec des régions qui disposent d’un fort potentiel de développement scientifique et technologique.
Pour la période de 2021 à 2024, la Haute Ecole Spécialisée de Suisse Occidentale (HES-SO) fait office de « Leading House » pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Dans un cadre bilatéral, un appel à projets de recherche entre la HES-SO et le ministère marocain de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation a ainsi été lancé en septembre 2022. Dix projets helvético-marocains devraient ainsi être financés. Un autre exemple des relations scientifiques est le programme « Excellence in Africa » (EXAF) lancé en 2020 par l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) et l’Université Mohammed VI Polytechnique qui vise à soutenir la recherche de pointe sur l’ensemble du continent africain.
Quels sont les chantiers majeurs d’Innosuisse à court et moyen termes ?
La Suisse ne peut se reposer sur ses lauriers. La concurrence internationale en matière d’innovation est très forte. Innosuisse veut donc continuer d’aider les petites et moyennes entreprises suisses à relever les défis qui les attendent, notamment en matière de transformation numérique, tout en conservant leur force d’innovation ainsi que leur compétitivité internationale. Le renforcement du secteur des start-ups et de l’entrepreneuriat en Suisse demeure une autre priorité pour Innosuisse. De plus, la consolidation et l’extension des coopérations internationales d’Innosuisse en Europe mais également avec divers pays à travers le monde sont des champs d’activités importants de l’Agence suisse pour l’encouragement de l’innovation.